Un pouvoir fédéral de dépenser balisé pour un fédéralisme renouvelé.

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Montréal, le 6 août 2024. — Le porte-parole de l’opposition officielle en matière d’Économie, de Finances et d’Innovation, Frédéric Beauchemin, souhaite faire son cheval de bataille pour la rentrée parlementaire l’encadrement du pouvoir fédéral de dépenser, par l’entremise de la tenue d’une Commission sur le déséquilibre fiscal, à l’Assemblée nationale du Québec. 


Alors que l'esprit du fédéralisme semble être remis en question, plongeons-nous plutôt dans l’avenir et réfléchissons au futur de ce partenariat que nous souhaitons gagnant pour le Québec. Ainsi, M. Beauchemin souhaite s’inscrire dans cette lignée en proposant la tenue d’une Commission sur le déséquilibre fiscal ayant comme priorité l’encadrement du pouvoir fédéral de dépenser, un outil utilisé comme une solution de contournement pour financer des programmes provinciaux, hors des champs de compétence fédéraux. Cette pratique crée une dépendance financière des provinces vis-à-vis des transferts fédéraux et impacte lourdement l’autonomie budgétaire de la province, tout en provoquant un important déséquilibre fiscal.


D’emblée, établissons que la fédération fonctionne lorsque les règles mises en place sont en fait respectées. C’est l’idée même d’une grande collaboration qui permet au Canada de prospérer. Feu Me Benoît Pelletier le disait avec justesse : 


« [...] la notion même de fédéralisme suppose l’adoption et le respect de règles claires. Les fédérations existent par le choix des entités constitutives de concéder une part de leurs pouvoirs à un ordre central de gouvernement, précisément dans la mesure où celui-ci se soumet aux règles qui ont permis dans un premier temps au pays de voir le jour ».


Suivons ces riches enseignements et soyons, au Québec, promoteurs d’un fédéralisme d’avenir. 


Or, actuellement, le son de cloche est tout autre. La tendance du fédéral en la matière est claire ; il dépense à sa guise les fonds publics dans les champs de compétence des provinces et contrevient au principe fédéral. En fait, il conditionne les transferts fédéraux à l’acceptation des priorités fédérales et non celle du Québec. Tout le contraire du partenariat gagnant qui doit plutôt régner. Il est temps d’adresser ce fléau et de réparer la fédération. 


De surcroît, l’administration fédérale actuelle consacre dans ses agissements la dérive de l’utilisation du pouvoir fédéral de dépenser. Systématiquement, ils imposent leurs orientations sociales et dépensières aux provinces, comme le Québec, ce qui perpétue le sous financement des services publics et limite la capacité pour les provinces de faire des choix politiques et financiers autonomes. Si cette pratique se poursuit ainsi, c’est notre démocratie qui est en jeu. Pas de quoi inquiéter l’actuel Premier ministre canadien qui affirmait en avril dernier ne pas se soucier des champs de compétence! 


Cette déclaration suivait l’annonce, dans les champs de compétence provinciaux, doit-on dire, de la création d’un Fonds de protection des locataires à hauteur de 470 millions. Sommes qui auraient pu être vues d’un bon œil, mais qui se dirigeront plutôt sous forme de contribution à des partenaires, comme des organismes à but non lucratif et non sous forme de collaboration avec les provinces. 


Dans cette déferlante vague d’empiètement au sein des champs de compétence provinciaux, l’on a peut aussi y retrouver une charte canadienne des locataires. Ingérence que le gouvernement du Québec n’aura pas tardé à dénoncer, puisqu’il s’agit d’une atteinte sans précédent à l’unicité juridique du Québec. Comme si ce n’était pas assez, une fois de plus, le gouvernement canadien a rendu l’incorporation de cettedite charte conditionnelle à l’obtention par les provinces de 5 milliards en fonds d’infrastructures liée au logement. À défaut d’en venir à un accord, ces fameuses sommes se dirigeront plutôt directement vers les municipalités et non-vers le gouvernement du Québec. 


Encore, en santé, le bilan est tout aussi désastreux. Ottawa multiplie les nouveaux programmes, mais le fait en sous-finançant les transferts existants. L’on a qu’à penser au programme d’assurance dentaire. En plus d’avoir lancé le programme sans s’entendre officiellement avec le Québec, c’est la consécration d’un programme mal ficelé, alors que le fédéral annonce ses programmes sans se soucier de l’implantation. Le ministre des relations canadiennes, Jean-François Roberge, l’a souligné avec brio en mars dernier. Il manquait toujours 3,3 milliards pour que les Québécois obtiennent les mêmes services que le reste des Canadiens, c’est inconcevable. Sommes-nous une seconde classe de Canadiens? 


Leur volonté est on ne peut plus établie, ils veulent maintenir une croissance du transfert fédéral en santé en dessous des besoins et consentir par la suite des sommes supplémentaires afin de dicter leur priorités aux provinces, qui n’ont d’autres choix que d’accepter par la suite. Plus que jamais, il faut revoir cette façon de faire, baliser ce pouvoir et cesser d’évoluer en marge de la constitution canadienne. 


En conséquence, M. Beauchemin contribuera à un vaste legs en poursuivant l'œuvre de M. Robert Bourassa, de l’honorable Jean Charest et de feu Me Benoit Pelletier - lui qui en avait fait une de ses grandes priorités - et proposera que la Commission sur le déséquilibre fiscal se penche sur la définition des limites du pouvoir fédéral de dépenser, le maintien de l’équilibre fédéral et la révision de l’article 40 de la Loi constitutionnelle de 1982 afin d’y inclure un droit de retrait avec pleine compensation pour le Québec plutôt qu’une « juste compensation », lorsque les provinces ne souhaitent pas participer à un nouveau programme dans un domaine de compétence provinciale exclusive et qu’elles s’engagent à mettre sur pied un programme compatible. Cela va consacrer la possibilité pour le Québec et les autres provinces de pouvoir bénéficier de ce droit de retrait systématiquement et non à la pièce et limitera l’utilisation du pouvoir fédéral de dépenser. 


En définitive, il faut noter de cette démarche que l’objectif n’est pas de retirer le gouvernement fédéral de la vie des Québécois, mais bien d’assurer la bienséance des relations intergouvernementales et de pérenniser le partenariat gagnant que se veut être la fédération canadienne.


« Le fédéralisme nous rend tous gagnants quand l’ensemble des joueurs respectent les règles du jeu. Chaque ordre de gouvernement possède ses propres compétences et sont les mieux positionnés pour allouer efficacement les ressources. Le Québec à ses compétences propres, qui lui permettent d’intervenir habilement dans ses champs de compétences, de même pour le gouvernement fédéral. Quand les règles du jeu sont respectées, ensemble, nous pouvons bâtir une société plus forte, plus prospère et plus verte, qui réside dans un partenariat plus que gagnant pour l’ensemble des Québécois et Québécoises! »

- Frédéric Beauchemin, député de Marguerite-Bourgeoys